L'accueil
baisse les rideaux, approche le canapé.
Et tandis que de l'urne bouillonnante et bruyante s'élève une colonne de vapeur,
et que les tasses, qui réjouissent sans enivrer, attendent chacun de nous,
faisons donc ici bon accueil à une soirée paisible ».
En principe, la ponctualité est un signe élémentaire d'éducation qu'il convient de respecter lorsque l'on est invité à un dîner. Il en est de même pour la maîtresse de maison qui se doit d'être prête à l'heure à laquelle elle a convié ses invités.
Arriver en avance à un dîner est cependant aussi mal élevé que d'arriver en retard, et risque d'être très embarrassant pour la maîtresse de maison à qui rien n'interdit de se trouver encore en peignoir.
La bienséance veut que l'on ajoute un « quart d'heure de politesse » à l'heure à laquelle on a été invité, et que l'on appelle pour s'excuser et prévenir si le retard dépasse une demi-heure.
Cette règle ne se vérifie malheureusement pas du tout à Paris et dans les grandes villes où il semble qu'il faille à tout prix arriver très tard pour montrer que l'on est important ! Les embouteillages et autres réunions de dernière minute au bureau ont bon dos, mais quelle exagération et quel manque de courtoisie pour les hôtes et les autres invités qui ont fait l'effort d'arriver à l'heure !
Les présentations sont, elles aussi, une tâche périlleuse, surtout dans un dîner mondain, où il faut veiller à ne froisser personne. Ce sont en général le maître et la maîtresse de maison qui s'en chargent. Un certain nombre de critères sociaux entrent dans l'ordre des présentations :
Par sexe : On présente un homme à une femme.
Par âge : On présente les plus jeunes aux moins jeunes.
Par statut : On présente les moins importants aux plus importants.
- Le rang a le dessus sur le sexe et sur l'âge.
- L'âge a le dessus sur le sexe.
Lorsque des invités arrivent dans un salon où se trouvent déjà plusieurs invités, les hommes se lèvent pour les saluer ; les femmes restent assises, à moins que le nouvel arrivant ne soit âgé ou occupe une place importante ; les jeunes filles se lèvent toujours sauf devant un jeune homme du même âge. En outre, un homme doit toujours se découvrir pour saluer hommes et femmes.
S'il y a déjà beaucoup d'invités au salon, l'amphitryon fait entrer le nouvel arrivant, le présente à un petit groupe près de la porte, s'assure qu'il engage la conversation et le quitte. Il n'est pas question en effet d'interrompre les trente invités déjà présents pour présenter les nouveaux.
La personne qui fait les présentations doit annoncer distinctement le nom et le prénom de l'intéressé, et peut éventuellement préciser en plus sa fonction, son lien de parenté ou un autre critère qui permettra non seulement de le situer au mieux, mais aussi de fournir un point de départ à une conversation. Il en est de même dans le cas d'auto-présentations.
La poignée de main.
C'est à la personne la plus importante, la plus âgée ou du beau sexe de tendre la main à la personne qu'on lui présente. Si elle ne le fait pas, la personne présentée se contentera d'incliner légèrement la tête en signe de déférence. C'est également à la personne réclamant le plus d'égards d'entamer la discussion.
L'usage est de déganter sa main avant de la tendre, car selon une coutume médiévale une main nue n'est pas suspecte, tandis qu'une main gantée peut cacher une pointe enduite de poison. Une poignée de main doit être franche et souple, ni trop longue, ni trop molle, ni trop forte.
Le baisemain est un geste qui tient du cérémonial et qui est très beau s'il est bien fait. De même que le vassal baisait la main de son seigneur au Moyen Age, et que l'on baise encore aujourd'hui l'anneau épiscopal, les hommes, même très jeunes, baisent la main des femmes en signe d'hommage.
- Le baisemain ne se fait qu'à une femme mariée.
- Il ne se fait pas sur une main gantée.
- Il ne peut se faire que tête découverte.
- Il est interdit dans un lieu public ou découvert sauf sur le parvis d'une église.
- Il vaut mieux éviter de faire le baisemain à une femme qui en ignore l'usage au risque de recevoir un grand coup dans la mâchoire !
- L'homme doit s'incliner vers la main tendue -et non l'élever à lui -et l'effleurer des lèvres sans y appuyer un gros baiser mouillé.
- Le baisemain est un geste naturel, il doit bien se faire ou ne point se faire !
L'accueil des invités est une étape délicate dans le déroulement de la soirée, car elle implique de veiller à plusieurs tâches en même temps, et comme elle est transitoire, elle interdit aux acteurs d'entamer une réelle discussion.
Le maître et la maîtresse de maison doivent être fin prêts lorsque les premiers invités sonnent à la porte. Ils se seront mis d'accord à l'avance sur le rôle de chacun afin d'éviter les maladresses et laisser les invités seuls au salon, alors que l'un est parti surveiller le four et l'autre déposer les manteaux au dressing !
Il faut accueillir chaque invité avec un mot aimable et lui proposer de se débarrasser : la maîtresse de maison ira ranger les manteaux dans le lieu prévu à cet effet tandis que le maître de maison conduira les invités au salon et leur servira un verre.
Si les invités ont apporté un cadeau, on l'ouvre devant eux et les remercie avec discrétion pour ne pas gêner ceux qui sont arrivés les mains vides. Si ce sont des fleurs, il convient de les mettre immédiatement dans un vase et de les porter dans la salle de réception ; si ce sont des chocolats ou confiseries, il faudra en proposer une fois le dîner terminé.
Il convient de saluer avant tout le monde le maître et la maîtresse de maison, même si l'on aperçoit un ami d'enfance perdu de vue que l'on brûle d'envie d'embrasser ! De même, on ne commencera pas une discussion avant d'avoir salué tout le monde. Il n'y a pas plus impolies que ces personnes qui se croient obligées dès qu'elles arrivent quelque part - en général en retard -de couper court à toutes conversations pour s'imposer comme centre de la soirée.
L'apéritif -du latin du bas latin aper(i)tivus, dérivé d'aperire « ouvrir » -est destiné à ouvrir l'appétit avant le dîner. D'aucuns prétendent qu'il est d'origine bourgeoise ; d'autres qu'il remonte au Moyen Age où l'on aimait déguster avant le repas du vin aromatisé aux herbes et aux épices ; d'autres encore soutiennent que les Romains déjà s'y adonnaient en buvant du vin sucré au miel... Quoi qu'il en soit, l'apéritif fait aujourd'hui partie intégrante de la vie sociale et familiale, et il semble impensable de recevoir à dîner sans proposer d'apéritif.
L'apéritif peut à lui seul être un motif d'invitation ; si l'on veut rendre une politesse à un voisin par exemple ou recevoir des personnes que l'on ne connaît pas encore, sans pour autant les garder toute la soirée.
Au fur et à mesure que les invités arrivent, le maître de maison leur propose un apéritif parmi la gamme d'alcools qu'il aura eu soin de préparer à l'avance. Plus il y a de choix, plus on est sûr de pouvoir contenter ses invités ; de toutes façons il ne faut pas proposer que des alcools forts ni que des vins doux.
Voici une liste d'apéritifs qu'il est bon d'avoir chez soi :
- Du champagne à déguster dans des coupes ou des flûtes.
- Des alcools forts type whisky, gin, vodka avec les sodas, jus de fruits et eaux gazeuses qu'ils réclament à servir dans des verres à whisky, à vodka, ou s'ils sont en cocktails dans des verres à orangeade.
- Des vins doux ou cuits du type porto, pineau, martini... à boire dans des verres à porto.
- Du vin rouge, en général le premier qui sera servi à table, à déguster dans des verres à vin.
- Des cocktails préparés à l'avance comme du punch à boire dans des verres à punch ou de la sangria dans des verres à vin.
- Du pastis à servir dans des verres à orangeade.
- Du jus de tomate, des sodas et des eaux pour ceux qui ne désirent pas d'alcool, à boire dans des verres à orangeade.
Les différents types de verres doivent être préparés à l'avance, ou à portée de main sur une desserte ou dans un meuble. Les glaçons, indispensables compagnons de l'apéritif, n'attendent pas les invités pour être démoulés.
En plus des boissons, il convient de faire passer des amuse-gueule. Il en existe de multitudes et l'on peut soi-même s'amuser à en préparer d'originaux ; en veillant à seulement ouvrir l'appétit des convives : pistaches, cacahuètes, amandes, gougères, olives, gâteaux secs, canapés divers, œufs de caille...
Au bout d'un moment, lorsque tous les convives sont arrivés et ont eu le temps de boire leur apéritif, la maîtresse de maison décide de passer à table.
S'il s'agit d'un dîner servi, c'est le maître d'hôtel qui proclame la célèbre phrase : « Madame est servie ». Si la maîtresse de maison a un titre, il dira « Madame la comtesse est servie » ; si c'est un homme qui reçoit, il dira « Monsieur est servi » ; si cet homme est veuf et que sa fille préside le dîner, il dira « Mademoiselle est servie » ; si parmi les invités figure une personnalité politique, c'est elle qui présidera le dîner et le maître d'hôtel annoncera « Monsieur le Ministre (le Président de la République, ou l'Ambassadeur...) est servi ».
Dans les dîners très protocolaires, l'étiquette veut que le maître de maison prenne par le bras la femme qui a la préséance sur toutes les autres, c'est-à-dire logiquement celle qui sera assise à sa droite, et la conduise à la salle à manger.
Si le dîner n'est pas servi, la maîtresse de maison se lève et invite simplement ses invités à la suivre à la salle à manger. Elle indique à chacun sa place -à moins qu'elle n'ait placé des cartons avec le nom de chacun à sa place -et s'assied. Chacune des autres femmes l'imite et les hommes s'asseyent à leur tour. Le dîner peut commencer…
Doit-on ou non apporter un cadeau lorsqu'on est invité ?
Normalement cela ne se fait pas pour un dîner. C'est même interdit pour une première invitation -il n'en va pas de même pour un séjour -mais de plus en plus de personnes dérogent à cet usage, et se croient obligés d'apporter des fleurs ou une bouteille de vin.
Les fleurs sont toujours appréciées, même si les puristes prétendent avec mépris qu'acheter des fleurs chez un fleuriste relève de manières bourgeoises, et que seules les fleurs de son jardin sont présentables ; ce qui est malheureusement assez difficile en ville ! Le plus élégant est d'envoyer les fleurs la veille ou le matin de la réception, accompagnées de sa carte, de façon à ce que la maîtresse de maison puisse les exposer. Les fleurs ont un langage, on peut donc à l'occasion d'un dîner lancer à travers elles un message (cf notre chapitre sur le langage des fleurs).
Apporter une bouteille est souvent embarrassant pour la maîtresse de maison -à moins que ce ne soit convenu -car elle a pris soin d'ouvrir à l'avance le nombre de bouteilles qu'elle aura jugées nécessaires, et a choisi soigneusement son vin en fonction de son menu.
Apporter un dessert signifie que l'on s'attend à ne pas en avoir, ce qui est fort inélégant, et il se peut que justement, ce soir-là, la fierté de la maîtresse de maison repose dans son dessert. A moins de l'avoir spécifié à l'avance, il vaut mieux s'abstenir d'apporter un gâteau.
Chacun en jugera, mais le fait d'apporter systématiquement quelque chose à un dîner rend ses hôtes redevables du même geste lorsqu'on leur rendra l'invitation, et enlève au plaisir d'être invité. Il suffit normalement de rendre l'invitation dans les mois qui suivent.
En revanche, un ami célibataire qui, en toute objectivité, ne pourra pas rendre l'invitation à ses hôtes doit avoir la délicatesse de gâter la maîtresse de maison de petites attentions : friandises, petits objets, fleurs..., s'il est régulièrement sur la liste des invités.
De la même manière, si l'on a une nouvelle à annoncer et que l'on dîne chez des bons amis, pourquoi ne pas apporter une bouteille de champagne ? Si l'on a su par hasard que c'était l'anniversaire du maître de maison, pourquoi ne pas lui apporter un petit cadeau ?
Il est préférable de garder ces gestes pour des occasions bien spécifiques plutôt que de les faire par une routine qui gâtera leur sens et leur saveur.