Quelque chose en nous du prix Goncourt
À l’origine de cet événement annuel tant attendu, le testament d’Edmond de Goncourt. Son idée est simple : récompenser un auteur d’expression française par un prix de 5 000 francs financé par la vente de ses biens après sa mort. Il confie à son ami et exécuteur testamentaire, Alphonse Daudet, le soin de fonder l’Académie Goncourt. Cette dernière récompense pour la première fois un ouvrage en 1903, l’année même de la naissance du Bottin Mondain. Mais nos affections communes ne s’arrêtent pas là.
Créé pour distinguer le « meilleur ouvrage d’imagination en prose », le Goncourt ne récompense presque exclusivement que des romans. « Beaucoup d’appelés, peu de lus », pour reprendre une expression d’Éric Neuhoff. Ce prix est un gage pour nous, lecteurs, de ne pas perdre notre temps. Il faut bien reconnaître au palmarès des ouvrages consacrés depuis plus d’un siècle qu’il forme un beau panorama de la littérature française. Mais le rapport avec le Bottin Mondain dans tout ça ? Patience, nous y venons…
Nous avons tous en nous quelque chose d’un prix Goncourt, comme aurait pu l’entonner un célèbre chanteur. Ces livres revêtus de la mythique bande rouge ont un jour accompagné nos soirées, nos week-ends, nos vacances. Où et quand avons-nous découvert À l’ombre des jeunes filles en fleurs de Proust ? Et tant d’autres auteurs passés à la postérité et dont on ne songe même plus à préciser le prénom tant ils nous sont familiers.
Il y a aussi des lauréats que nous ne connaissons pas, sinon de réputation, des romans récents ou anciens dont la lecture pourtant s’impose à nous comme une évidence : ils font partie de leur temps, et sont nécessaires à sa compréhension. Pour revivre la guerre de 14-18, la lecture du Feu de Barbusse (1916) s’impose. Il y a aussi les « coups de cœur », comme Léon Frapié. Qui se souvient encore de lui ? Et pourtant, pourtant…
Tous les noms que nous venons de citer ont un jour été présents dans les pages du Bottin Mondain. Vos parents, grands-parents, arrière-grands-parents en ont peut-être partagé les colonnes. S’ils font partie du patrimoine littéraire français, ils sont aussi un fragment de l’histoire de notre univers personnel, plus intime.
À l’occasion du nouveau prix Goncourt, c’est donc à d’émouvantes retrouvailles et aussi à de magnifiques découvertes que nous vous invitons aujourd’hui. Ne vous privez pas de lire (ou relire) d’anciens lauréats qui, comme vous, ont participé à la grande fresque des familles du Bottin Mondain.
1904 - Léon FRAPIÉ, La Maternelle (Albin Michel)
1916 - Henri BARBUSSE, Le Feu (Flammarion)
1918 - Georges DUHAMEL, Civilisation (Mercure de France)
1919 - Marcel PROUST, À l’ombre des jeunes filles en fleurs (Gallimard)
1925 - Maurice GENEVOIX, Raboliot (Grasset)
1933 - André MALRAUX, La Condition humaine (Gallimard)
1938 - Henri TROYAT, L’Araigne (Plon)
1948 - Maurice DRUON, Les Grandes familles (Julliard)
Ne manquez pas de lire, ou relire les billets suivants : « À vos classiques ! », « Proust en capitale » et « Quand épée rime avec immortalité ».
Edmond de Goncourt, Nadar © Flickr